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Histoire de l’Espagne, partie 3 : de la disparition de l’empire à la guerre civile

La fin de l’empire

La révolution industrielle vers la fin du 19e siècle eut pour conséquence l’accumulation de davantage de richesses pour la bourgeoisie et la formation d’une classe d’ouvriers qui s’organisa de plus en plus. La différence croissante entre la richesse des uns et la pauvreté des autres résulta en de fréquents affrontements entre ouvriers et forces de l’ordre et une montée de l’anarchisme. Le vide laissé par la mort d’Alphonse XII  en 1885 (son fils Alphonse XIII fut sous la régence de sa mère jusqu’en 1902) renforça les affrontements, cette fois s’étendant aux colonies, avec des insurrections à Cuba et aux Philippines à partir de 1895, alors que les Etats-Unis commençaient à porter leur regards sur les possessions espagnoles sur leur continent. Après que le cuirassé américaine Maine fut coulé dans la baie de La Havane, entraînant la mort de plus de 200 américains, les Etats-Unis déclarèrent la guerre à l’Espagne, s’emparèrent de Cuba, des Mariannes, des Philippines et Porto Rico en 1898. C’en fut fini de l’empire espagnol autrefois si puissant.

Ce que les espagnols appellent le « désastre » de 1898 entraîna un bouleversement de l’échiquier politique : le Parti Conservateur – qui se scinda entre traditionalistes et modérés – et son rival le Parti Libéral, qui se partageaient le pouvoir, furent débordés par les socialistes, les anarchistes, les radicaux, les républicains, les nationalistes catalans qui tous avaient leur solution à la crise, sans compter l’armée et l’Eglise qui voulurent garder leur rôle dans la société. La violence devint monnaie courante, deux premiers ministres et de nombreux citoyens furent tués lors d’attentats à la bombe, le roi Alphonse XIII ayant été lui-même cible d’une bombe lors de son mariage en 1906, attentat qui échoua mais fit néanmoins 24 victimes innocentes, tandis que la pauvreté des régions du sud amena à un exode rural vers les grandes villes comme Madrid ou Barcelone, conduisant à une surpopulation et à des troubles sociaux aggravés. La Semaine Tragique de Barcelone vit les forces de sécurité affronter une révolte populaire dirigée par les anarchistes, les socialistes et les républicains et résulta en de violences anti-cléricales, la destruction de 70 bâtiments, églises et couvents, et la mort de plus de 100 ouvriers. Les pièces sont désormais en place pour la future guerre civile.

L’Espagne, qui demeura neutre pendant la Première Guerre Mondiale, se caractérisait alors par une instabilité politique forte. La mort de milliers de jeunes conscrits au Maroc espagnol et l’enquête lancée par les Cortes (le Parlement) amena les généraux à déclarer un pronunciamiento et à mettre l’Espagne sous dictature militaire, avec la bénédiction d’Alphonse XIII. Le général Primo de Rivera, à la tête de la dictature, se distingua par une politique à l’opposée de ce qu’on attend (ou redoute) d’un dictateur et parvint à moderniser le secteur public, réforma la fiscalité, s’attaqua aux pouvoirs abusifs des petits potentats locaux, régla la question marocaine par compromis plutôt que par la force et encouragea l’opposition. De révoltes localisées subsistaient néanmoins, et les effets de la crise de 1929 atteignirent l’Espagne. Après que le général se soit retiré à Paris en 1930 (où il mourra la même année), Alphonse XIII essaya vainement de perpétuer la dictature avec un autre officier supérieur mais dut finalement se résoudre à restaurer la République. Après la victoire des radicaux et des républicains aux élections de 1931, le roi annonça son départ en exil.

La Seconde République porta d’abord au pouvoir les libéraux, les socialistes et les anti-cléricaux qui séparèrent l’Eglise et l’Etat, donnèrent le droit de vote aux femmes, promirent des réformes agraires en faveur des pauvres et donnèrent un parlement autonome à la Catalogne en échange d’un soutien politique. Mais les réformes promises ne furent jamais réalisées et l’autonomie catalane ne fit qu’accentuer la peur d’une fissure de l’unité nationale. Le pays demeurait marqué par les divisions qui l’avaient agité depuis les trente dernières années. Aux élections de 1933, les espagnols donnèrent le pouvoir à un gouvernement de droite, avant de redonner par un mouvement de pendule inverse le pouvoir à la gauche en 1925. La suite fut une série de grèves, de conspirations, de violences et d’assassinats entre gauche et droite, amenant le pays dans l’enlisement politique et au bord de la guerre civile entre fractions qui cristallisaient les divisions du pays depuis le début du siècle.

La Guerre Civile

Lorsque gouvernement de gauche menaça en 1936 ce qui était considéré par les conservateurs comme les piliers de l’Etat : l’armée, l’Eglise et la propriété privée, les plus hauts gradés de l’armée avec à leur tête le général Francisco Franco Bahamonde lancèrent une révolte. Très vite avec l’aide des troupes fidèles à Franco (la légion étrangère et les unités maures composées d’indigènes marocains), ils contrôlèrent l’est et le nord-est du pays, et furent rejoints par l’essentiel de l’armée de terre et de l’air, la garde civile, ainsi que des volontaires issus des partis monarchistes, catholiques et de l’organisation fasciste la Phalange. En face, en soutien du gouvernement se retrouvèrent des officiers et des hommes de l’armée régulière, l’essentiel de la marine et des milices civiles formées de socialistes, d’anarchistes, de trotskistes, de communistes, ainsi que des nationalistes basques et catalans. Même si on les qualifie sous les vocables globaux de loyalistes ou de républicains, rien ne lie vraiment ces différentes factions aux objectifs souvent divergents, à part la volonté commune de résister aux rebelles nationalistes. Cette disparité fut d’ailleurs une des raisons de la faiblesse des républicains.

Les débuts de la Guerre Civile furent marqués par des atrocités sans pareilles. Les républicains s’en prirent d’abord aux représentants des conservateurs dans les régions qu’ils contrôlèrent, et les factions les plus anti-cléricales s’en prirent particulièrement aux religieux, massacrant douze évêques et des centaines de prêtres, sœurs et séminaristes. Les représailles des nationalistes furent tout aussi brutales, exécutant en masse les sympathisants républicains dans les villes qu’ils contrôlaient. Des puissances étrangères virent en l’Espagne un échiquier où leur influence pouvait se développer. Franco reçut ainsi l’aide de l’Allemagne d’Hitler et de l’Italie de Mussolini sous forme de troupes et d’avions, tandis que l’URSS envoya des conseillers techniques et des chars aux républicains. La France, les Etats-Unis et la Grande Bretagne demeurèrent officiellement neutres, mais n’empêchèrent pas des milliers de leurs nationaux de se porter volontaire et se joindre aux Brigades Internationales aux côtés des républicains.

Au bout d’un an, les troupes de Franco, qui avait fait le vide autour de lui (tous ceux qui pouvaient rivaliser avec lui pour la conquête du pouvoir disparurent) contrôlèrent tout le pays, à l’exception de Madrid, un partie du nord et la Catalogne. En 1937, les nationalistes se concentrèrent désormais sur le nord. En avril, Guernica est bombardée par des pilotes de la Luftwaffe sous la direction de Franco (inspirant à Picasso son célèbre tableau la même année). Dans le même temps, les querelles intestines se firent de plus en plus importantes entre communistes, anarchistes et modérés républicains. De même, l’arrivée des volontaires des Brigades Internationales ne compensa pas la diminution progressive de l’assistance soviétique : la Seconde Guerre Mondiale était à l’horizon et Hitler et Staline avaient des projets communs. Le gouvernement républicain fut alors forcé de déménager à Valence puis un an après à Barcelone. Le 28 décembre 1938, les forces rebelles attaquèrent Barcelone qui tomba après 34 jours. Les républicains n’eurent alors d’autre choix que de partir se réfugier en France. Le 28 Mars, les nationalistes entrent dans Madrid sans rencontrer de résistance, marquant ainsi la fin de la guerre civile. Entre 600.000 et 800.000 personnes, civils et combattants, moururent pendant cette période où l’Europe, juste avant la Seconde Guerre Mondiale, eut un aperçu édifiant des horreurs de la guerre.

Si votre programme touristique vous emmène visiter le palais d’El Escorial près de Madrid, l’immense monument de la Valle de los Caídos situé pas loin de là vous permettra de toucher la mémoire de la Guerre Civile et les blessures à peine cicatrisés qu’elle a laissé. Sa construction controversée fut décidée par Franco (qui y est enterré d’ailleurs), et l’actuel gouvernement de José Luis Zapatero vient de décider d’en faire un monument apolitique et dédié uniquement au culte religieux, destiné à honorer la mémoire de toutes les victimes de la Guerre Civile et des répressions politiques subséquentes.

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